La liste des signataires de l’appel au 29 octobre 2008 :
L’appel pour la défense conjointe des SES dans le secondaire et des sciences sociales à l’Université a reçu un écho non négligeable (plus de 400 signatures), dans le supérieur notamment, auprès des sociologues en particulier. Nombreux sont les professeurs de SES qui ont également signé cet appel, en pensant, comme nous, que seule une association entre les professeurs de SES et ceux du supérieur était susceptible de sauver ce qui peut (pouvait) encore l’être des SES et des sciences sociales. Néanmoins, le refus de l’APSES (Association des professeurs de sciences économiques et sociales) d’amender cet appel comme bon lui semblait et de le signer rend son exploitation politique bien difficile. Nous cessons donc toute communication autour de cet appel, qui peut néanmoins encore recevoir des signatures.... sait-on jamais...
Signez cet Appel en envoyant un courrier à l’adresse suivante : mausspermanent@yahoo.fr , en indiquant vos nom et prénom suivis de votre statut :
Professeur de SES, Académie
Maître de Conférences, discipline et institution de rattachement
Professeur des universités, discipline institution de rattachement
Chercheur, discipline, institution de rattachement
Etudiant, discipline et institution de rattachement
Autres : préciser (Lycéen, Parent, chef d’établissement etc.)Nous publierons régulièrement la liste des signataires.
De très lourdes menaces pèsent au Lycée sur l’enseignement des sciences économiques et sociales et sur l’existence même de la filière ES. Face à ces menaces les professeurs de SES se retrouvent divisés - et donc extrêmement fragilisés- sur des choix à la fois pédagogiques et épistémologiques. Or aussi légitimes que puissent être les arguments des uns et des autres, tactiques ou de fond, ils ne doivent pas masquer le problème essentiel : celui du mode d’articulation souhaitable de l’enseignement des SES dans le secondaire avec l’enseignement à l’Université des disciplines représentées dans la filière ES. De leur côté, un nombre appréciable de professeurs des universités, économistes ou sociologues notamment, ont marqué leur attachement au maintien de la filière ES. Mais il n’est pas sûr que tous aient vu que ce n’est pas seulement dans le secondaire que les sciences économiques ou la sociologie risquent de se voir ramenées à la portion congrue, mais que leur fragilisation est déjà bien entamée dans l’enseignement supérieur. Car c’est le principe disciplinaire lui-même qui est visé par toutes les réformes récentes qui, LMD aidant, lui préfèrent les cursus à la carte. Dans l’enseignement supérieur le choix est donc clair : soit laisser s’accentuer la désaffection des étudiants pour les disciplines instituées et les laisser s’engager dans des cursus pluridisciplinaires indéterminés – ceux-la mêmes que le Ministère semble vouloir substituer à la filière ES dans le Secondaire-, soit organiser une interdisciplinarité pensée et construite, qui sauvegarde les logiques disciplinaires mais qui accepte leur croisement notamment dans le premier cycle universitaire. Or cette interdisciplinarité organisée est précisément celle que met en œuvre la filière ES à laquelle il importe désormais d’aménager un débouché clair dans l’enseignement supérieur. C’est donc un combat commun pour les sciences sociales que sont appelés à mener enseignants en science sociale des Lycées ou des Universités. C’est pour exprimer cette nécessité et cette urgence qu’a été rédigé le présent appel qui n’entend se substituer à aucun des appels, manifestes ou prises de position existant, mais mettre le doigt sur un problème (et une solution) guère mentionné jusqu’à présent dans les débats en cours, et montrer que les tenants des positions les plus antithétiques sur certains points peuvent se retrouver en accord sur d’autres puisque, de fait, aucun d’entre eux n’a trouvé à redire en profondeur au point de vue exposé ici. Au contraire. Un accord le plus large possible, qui n’oblige personne à renier ses autres prises de position, nous renforcerait tous.
CONSIDERANTS GENERAUX :
1. Le développement des sciences sociales – science économique et sociologie, en liaison avec l’Histoire, la géographie, la philosophie politique etc. – a permis aux sociétés modernes de légitimer la démocratie, de se penser et de s’organiser en rupture avec l’ordre des sociétés hiérarchiques traditionnelles. En définitive, nos sociétés ne sont devenues prospères, efficaces et capables d’accepter le pluralisme des opinions, que parce que le développement des sciences sociales, de proche en proche, les a rendues plus conscientes d’elles-mêmes, plus intelligentes, plus réflexives.
2. Dans la nouvelle configuration du monde, au rebours de ce qui s’est passé en Europe et aux États-Unis, on voit bien apparaître, il est vrai, des sociétés aux taux de croissance vertigineux qui se dispensent de cette réflexivité et des sciences sociales, tenues en forte suspicion, comme la philosophie. Mais nombre de ces sociétés dites émergentes se dispensent aussi de la démocratie. Or nul ne sait combien de temps elles pourront tenir ainsi, dirigées d’une main de fer par des régimes politiques autoritaires. En tout état de cause, les sociétés occidentales ne sauraient accepter ce qui serait pour elles une formidable régression : le refus conjoint de la réflexivité et de la démocratie.
3. Pour ces raisons, il n’est pas plus envisageable de supprimer les enseignements de sciences économiques et sociales que ceux de Lettres ou de philosophie, sauf à vouloir faire disparaître définitivement le peu qui subsiste de la tradition humaniste et démocratique dont sont issus nos enseignements secondaire et universitaire.
4. Et l’on voit bien que si les cours de sciences économiques et sociales devaient ne plus subsister qu’à titre d’option, si devait disparaître la série ES pourtant si prisée par les élèves et si efficace quoi qu’on dise dans la formation qu’elle prodigue, c’est une bonne partie de l’enseignement secondaire général, rabattu sur un pullulement de formations supposées professionnalisantes, qui perdrait sa cohérence intellectuelle et son armature scientifique.
5. Mais les SES sont-elles scientifiques, se demandent les critiques ? Insuffisamment pour l’instant semble répondre le rapport Guesnerie. Assez, malgré tout, pour l’essentiel, et plus encore si on suit ses prescriptions, jugent ceux qui y lisent, au-delà des critiques qu’il formule, un aval donné au droit à l’existence même des SES. Or, il est possible de diverger grandement sur les critères de la scientificité d’une discipline. Entre professeurs de SES, par ailleurs, existe un débat vif et récurrent sur le point de savoir s’il convient dans le secondaire d’enseigner les sciences sociales en privilégiant une « approche par les problèmes » ou une « approche par les objets ». Mais en amont de ces débats épistémologiques et pédagogiques, légitimes et nécessaires, mais qui n’ont de sens que pour autant qu’on a d’abord pleinement reconnu le besoin qu’a la société des sciences sociales, l’accord est total et général sur les principes essentiels suivants :
CONSIDERANTS PRATIQUES :
6. L’existence dans le secondaire d’une filière de sciences économiques et sociales qui permet aux élèves de comprendre les rouages de la société de leur temps - du monde où ils sont appelés à vivre, à travailler et à agir – en leur faisant découvrir, sur chaque objet étudié la diversité des approches disciplinaires, et, au sein de chaque discipline la diversité des écoles de pensée, est un acquis essentiel de l’enseignement secondaire français sur lequel il est d’autant moins question de revenir que sa liquidation entraînerait vite, dans la foulée, celle des enseignements de philosophie et une minimisation de la place des autres enseignements de culture générale humaniste (Lettres, Histoire-géographie). Elle préluderait d’ailleurs tout autant, à très brève échéance, à une minimisation à l’Université et dans la Recherche, du rôle et de la place des sciences humaines et sociales. Or, ce déclin du rôle reconnu aux sciences sociales et à la philosophie est déjà bien avancé depuis plusieurs années. Il place la France dans une position de retard intellectuel désormais trop palpable non seulement sur les pays anglo-saxons, favorisés par la richesse et le nombre, mais aussi sur d’autres systèmes universitaires. Ce déclin intellectuel en entraîne d’autres, à commencer par une perte de rayonnement et d’influence à travers le monde, qui sera difficile à rattraper.
7. Il n’est donc pas possible de poser séparément la question de la survie des SES, celle de l’avenir possible des valeurs humanistes de culture générale et celle, enfin, de l’avenir universitaire en France des sciences économiques, de la sociologie et des autres sciences humaines et sociales, ethnologie, philosophie, Histoire, géographie, Lettres etc. Dans le sillage des SES, c’est l’avenir de toutes ces disciplines qui devient aujourd’hui de plus en plus problématique.
8. Une des raisons principales de la fragilité spécifique de la filière ES réside dans le hiatus béant qu’on a laissé s’instaurer, en la matière, entre enseignement secondaire et enseignement supérieur. Il n’existe pas, en effet, dans l’enseignement supérieur de discipline organisée qui corresponde directement et naturellement à ce qui s’enseigne sous le sceau des SES dans l’enseignement secondaire.
9. Symétriquement, dans l’enseignement supérieur et dans la Recherche, un grand nombre d’enseignants, formés dans une des disciplines des Sciences humaines et sociales (SHS), attachés à leur discipline, mais également désireux de croiser son regard avec celui d’une ou de plusieurs autres se voient interdire de le faire professionnellement (c’est nuisible pour leur carrière), alors pourtant que nombre des idées innovantes et profondes naissent à l’articulation des champs disciplinaires constitués et que, de plus en plus, les nouveaux étudiants – et bien souvent les meilleurs - entrant à l’Université cherchent à s’inscrire dans des filières bi-disciplinaires : Science politique et Histoire, Histoire et ethnologie, Droit et économie, philosophie et sociologie, et enfin, bien sûr, sociologie et économie, la combinaison même qui est au cœur des SES.
10. L’intérêt pédagogique de ces filières disciplinaires ne fait pas de doute puisqu’elles sont plébiscitées par tous les étudiants qui peuvent y accéder. Mais leur intérêt scientifique n’est pas moindre. Elles ne forment pas à une introuvable transdisciplinarité en surplomb des disciplines existantes, et pas non plus à une pluridisciplinarité indéterminée et sans squelette intellectuel, dans laquelle on se borne à apprendre à baragouiner quelques mots de tout un ensemble de disciplines qui n’ont d’autres liens entre elles que la commodité supposée du moment. C’est, au contraire, une véritable interdisciplinarité (bi-disciplinaire) dialogique qu’il s’agit d’instituer tant dans l’enseignement secondaire que dans l’enseignement supérieur.
11. Car il faut comprendre que c’est à la même menace que se trouvent désormais affrontés les enseignants en sciences sociales du secondaire et du supérieur : celle d’un émiettement et d’une parcellisation généralisée des savoirs constitués. Dans le secondaire comme dans le supérieur c’est en effet vers la mise en place de cursus à la carte que l’on tend systématiquement, dans lesquels n’importe quoi pourra se combiner avec n’importe quoi : un morceau de droit, des bribes de gestion et de comptabilité, une bonne pincée de microéconomie avez un zeste de macroéconomie, une sauce sociologique, un bout d’histoire, deux doigts de philosophie politique etc. au gré des caprices ou des élèves ou des étudiants et des modes du moment.
12. Le principal danger pour tous ceux qui sont attachés aux sciences sociales serait de s’enfermer dans la seule défense de l’existant sans prendre la mesure de ce qui le menace, non seulement de l’extérieur (les velléités parcellisatrices du Ministère) mais aussi de l’intérieur : dans le secondaire, la crispation sur la défense des SES pour le seul enseignement secondaire sans tenter de l’articuler clairement et structurellement avec l’enseignement supérieur. À l’Université et dans la Recherche, la crispation sur la seule défense, en elle-même légitime des disciplines existantes, sans leur permettre de se structurer et de s’instituer aussi en articulation avec les autres disciplines des sciences sociales.
13. Dès lors, la véritable réforme en profondeur qui s’impose n’est pas difficile à imaginer. Plutôt que de prétendre tout casser de l’existant au risque de ruiner définitivement le potentiel scientifique des SHS françaises, mieux vaudrait instituer dans l’enseignement supérieur et dans la Recherche, parallèlement aux sections disciplinaires existantes et en interaction avec elles, une ou plusieurs sections interdisciplinaires, ce qui permettrait de former non seulement des spécialistes mais aussi des généralistes en science sociale. Symétriquement, l’enseignement universitaire de science sociale, notamment dans les premiers cycles, devrait faire largement doit à l’esprit d’interdisciplinarité, celui qui anime précisément la filière ES.
DEUX DEMANDES :
Paris, le 18 septembre 2008, date de mise en ligne de cet appel.
La date qui figure en haut de page est la date de republication de l’article sur la page d’accuel du site.
Signez cet Appel en envoyant un courrier à l’adresse suivante : mausspermanent@yahoo.fr , en indiquant vos nom et prénom suivis de votre statut :
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L’appel a été publié sur le site de l’Association française de sociologie dans la semaine du 1er octobre. On peut y lire les lignes suivantes :
Aux membres de l’Association française de sociologie
Chers collègues
Au moment où dans le secondaire la filière ES, qui forme la majorité des futurs étudiants de sociologie ou d’économie, est clairement menacée de disparition ou de dilution dans une ensemble d’options dénuées de principe unificateur, nous devons tous constater la diminution du nombre d’étudiants en sociologie et, plus généralement, dans les disciplines qui conservent une dimension généraliste et pas immédiatement professionnnalisante. Chacun, bien sûr, peut espérer s’en tirer séparément, mais il semble plus judicieux de prendre le taureau par les cornes et, plutôt que de nous laisser imposer une situation sur laquelle nous n’aurons aucune prise véritable, de commencer à réfléchir sérieusement à la réinscription de l’enseignement de la sociologie dans des cursus interdisciplinaires voulu, pensés et maîtrisés par nous, en alliance avec les spécialistes d’autres disciplines universitaires, et notamment la science économique, et avec nos collègues de SES dans le secondaire. Tel est le sens de l’appel suivant que nous vous appelons à rejoindre. Il y a urgence.
Premiers signataires :
Stéphane Beaud, Alain Caillé, Philippe Cibois, Jean-Pïerre Terrail, François Vatin
Une campagne de signatures vient juste d’être lancée (04/10) auprès des économistes.
Version papier de l’appel
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