J. Is for Junk Economics. Petit bréviaire économique (1)

Traduction, par Christophe Petit et Thibault Mirabel, de l’Introduction de l’ouvrage de l’économiste américain Michaël Hudson « J Is for Junk Economics : A Guide to Reality in an Age of Deception », 2017.
En attendant la publication d’autres extraits ...

INTRODUCTION

« Il est certain qu’en dernière analyse une langue doit son déclin à des causes politiques et économiques. (…) Elle devient laide et imprécise parce que notre pensée est stupide, mais ce relâchement constitue à son tour une puissante incitation à penser stupidement. Pourtant ce processus n’est pas irréversible. (…) Si l’on se débarrasse des mauvaises habitudes, on peut penser plus clairement, et penser clairement est un premier pas, indispensable, vers la régénération politique. »
George Orwell, « La politique et la langue anglaise » (1946)

« Vous pouvez duper certaines personnes tout le temps. Ce sont celles sur lesquelles vous devriez vous concentrer »
George W. Bush (2001)

Confucius pensait que les troubles sociaux commençaient par l’incapacité de nommer les choses par leurs noms. La première étape pour réformer un monde mal structuré est donc la « rectification des noms ». Pour Confucius, cela signifiait restaurer le sens original des mots.

La terminologie économique actuelle a manifestement besoin d’une telle rénovation. En rejetant l’économie classique d’Adam Smith, de John Stuart Mill et des autres critiques de la propriété foncière et des monopoles, les défenseurs des revenus de prédation [1] ont brouillé et obscurci la terminologie économique au moyen d’euphémismes pour nier l’existence d’un repas gratuit [2]. Les termes rentier et usure, qui ont joué un rôle si central au cours des siècles passés semblent aujourd’hui anachroniques et ont été remplacés par une double pensée orwellienne plus consensuelle.

Comme les annonceurs le savent, nommer un produit modifie la façon dont les gens le perçoivent. Une vaste opération de relations publiques a été mise au point pour inverser le sens des mots et faire passer des vessies pour des lanternes. Nulle part cette tactique n’est plus politique que dans la promotion de l’idéologie économique. Le vocabulaire actuel de la richesse et le passage à une économie de rente et d’usure est euphémisé comme un progrès vers une société de loisirs, et non vers une servitude par la dette. Les bulles financières qui gonflent les prix afin d’acheter une maison ou un plan d’épargne-retraite sont appelées « création de richesse », et non inflation par le prix des actifs liée à l’endettement, tandis qu’une réduction des effectifs et une dissolution des entreprises industrielles est appelée « création de valeur » et non pillage.

Le vocabulaire économique est défini par les vainqueurs actuels - la classe financière des rentiers.

Dans À travers le miroir de Lewis Carroll, Alice apprend que la définition des mots dépend de celui qui est aux commandes. « Quand j’utilise un mot, dit Humpty Dumpty d’un ton plutôt méprisant, cela signifie exactement ce que je veux dire - ni plus ni moins (…) La question est de savoir qui est le maître – c’est tout. »

Tout comme l’histoire est écrite par les vainqueurs, les groupes intéressés parrainent des porte-paroles du monde académique et des journalistes pour façonner le vocabulaire des médias de manière à dépeindre Wall Street comme jouant un rôle productif. Plus son comportement est prédateur, plus il est nécessaire de façonner l’opinion publique en abusant de la langue et en décernant régulièrement des prix pour avoir expliqué comment les « marchés libres » fonctionnent sans « ingérence » gouvernementale imposant ou réglementant les richesses. 

Le consensus néolibéral actuel de Washington renverse le libéralisme classique en favorisant l’extraction de rente prédatrice, la politique fiscale régressive et la déréglementation. « Réformer » signifie maintenant annuler ce que l’on considérait au XXe siècle comme une réforme. Les politiques anti-travaillistes visant à réduire le pouvoir syndical et la protection du lieu de travail sont qualifiées de réformes, de même que la réécriture de la législation sur les faillites inversant la longue tendance d’un traitement plus humanitaire des débiteurs.

Nulle part le vocabulaire de la double pensée orwellienne n’a été plus flagrant que dans la conquête financière de la Grèce par la « troïka » de la zone euro - la Banque centrale européenne, la Commission européenne et le FMI. James Galbraith, conseiller du ministre grec des Finances Yanis Varoufakis, a été interrogé pour savoir si « les institutions (le FMI, la CE et la BCE) devront sauver la Grèce indéfiniment ». Il a répondu :

« Il n’y a pas de ’sauvetage’ ici. Il n’y a pas de ’sauvetage’, il n’y a pas de ’renflouement’, il n’y a pas de ’réforme’ en cours. J’ai vraiment besoin d’insister là-dessus, car ces mots s’insinuent dans notre discours. Ils y sont placés par les créanciers afin que les imprudents puissent les utiliser, mais rien de la sorte ne se passe. Ce qui se passe est une saisie des avoirs détenus par l’État grec, par des entreprises grecques et par des ménages grecs. Cela n’a rien à voir avec la reprise de l’économie grecque ou avec le bien-être du peuple grec. Au contraire, la politique est totalement indifférente à ces considérations. [3] ».

Un vocabulaire décrivant la classe financière des rentiers comme productive

Chaque intérêt spécial prétend être juste et équitable. Les banquiers et les propriétaires préfèrent naturellement un vocabulaire qui les décrit comme productifs plutôt que prédateurs. Le vocabulaire anti-classique actuel redéfinit en conséquence les « marchés libres » comme des marchés libres pour les extracteurs de rentes. Afin de dissuader la réglementation, la taxation ou la nationalisation - voire même afin d’obtenir des subventions publiques et des garanties gouvernementales - les lobbyistes du secteur de la finance, des assurances et de l’immobilier (FIRE sector) [4] présentent les rentes et les intérêts comme reflétant la contribution de leurs bénéficiaires à la richesse, et non leurs privilèges d’extraire des rentes de l’économie.

De la même manière, la comptabilité américaine des produits et des revenus (NIPA) [5], apparemment empirique, signale les intérêts et les rentes comme des « revenus », comme si les banquiers et les propriétaires participaient au produit intérieur brut (PIB) sous la forme de services de crédit et de propriété. Cette pratique est en contradiction avec la définition de John Stuart Mill de la rente foncière comme étant ce que les propriétaires sont en mesure de gagner « dans leur sommeil » ; en faisant payer des droits d’accès aux sites créés par la nature et valorisés par la prospérité générale de la communauté. Décrire cette charge comme un « revenu » pour la fourniture d’un « produit » économique, c’est prétendre que l’extraction de la rente reflète la production réelle, comme s’il s’agissait d’un service utile.

Ce qui est en jeu c’est la définition classique de la rente économique en tant que revenu de prédation - l’excédent du prix sur la valeur réelle du coût de revient - une revendication ou un privilège de propriété ne reflétant pas un coût de production nécessaire. En fin de compte, ces coûts sont réductibles au paiement de la main-d’œuvre. En effet, la théorie de la valeur travail a été perfectionnée pour isoler la rente économique. En rejetant la théorie classique de la valeur et des prix, l’économie actuelle, littéralement sans valeur, repose sur l’hypothèse qu’aucune activité n’est improductive ou extractive.

Cette inversion du langage dénature ce que les principaux économistes classiques représentaient. Adam Smith et ses épigones auraient favorisé les « marchés libres » et se seraient opposés à « l’ingérence » des gouvernements. Ce à quoi ils se sont réellement opposés, ce sont les gouvernements contrôlés par une aristocratie de propriétaires qui dominait la politique fiscale, en utilisant par exemple le pouvoir de la Chambre des Lords pour taxer le travail et l’industrie au lieu de la terre et de la finance. Smith critiqua les expéditions militaires et le colonialisme pour leur accumulation de dettes de guerre sous la forme de bons du Trésor qui sont payés par la taxation des biens de première nécessité.

À la fin du XIXe siècle, les mouvements de réforme prenaient le dessus. Sous l’influence de Darwin, presque tout le monde voyait le capitalisme industriel évoluer pour devenir ce que l’on a appelé le socialisme. Du socialisme chrétien au « socialisme ricardien » de Mill et du socialisme utopique au socialisme libertaire de Henry George, le terme « socialisme » avait une grande variété de constructions. Le socialisme marxiste a qualifié le capitalisme de révolutionnaire pour aboutir inexorablement à un renforcement de la propriété et de la direction publique de l’économie, souvent par le biais de systèmes bancaires nationalisés.

Aussi surprenant que cela puisse paraître aujourd’hui, les réformes « socialistes » devaient aboutir aux idées classiques de création d’un marché libre. Leur objectif commun était d’empêcher les populations de payer des prix comprenant une rente ou une taxe financière ne provenant pas de la main-d’œuvre pour payer les propriétaires fonciers, les propriétaires de ressources naturelles, les monopoleurs et les créanciers. Les intérêts des lobbys se sont élevés contre la réglementation publique et la fiscalité allant dans ce sens. Ils se sont opposés à la propriété publique ou même à la taxation des monopoles fonciers, bancaires et d’infrastructure de caractère public.

Aujourd’hui, les néolibéraux et leurs mascottes libertaires cherchent à rendre les gouvernements trop faibles pour remplir le programme classique consistant à taxer les terres et les ressources naturelles, à réglementer ou à prévenir les monopoles, ou à fournir des services financiers et économiques de base au moyen d’investissements publics. Dénigrer la réglementation en tant que « planification centralisée » a pour effet de laisser la planification aux centres financiers mondiaux de Wall Street à la City de Londres, de Francfort à la Bourse de Paris, qui exercent tous des pressions pour le compte de leurs clients rentiers. Ce qui s’appelle libertaire est donc devenu un mouvement anti-Lumières abondamment financé qui s’oppose aux gouvernements dotés de pouvoirs démocratiques.

Marchés libres, liberté et antidote contre les ’vues fausses’

Denis Diderot (1713-1784) organisa l’écriture de l’Encyclopédie en tant que projet des Lumières françaises. Publiée par feuillets de 1751 à 1772, elle contenait une carte du savoir humain suivant le programme politique des Lumières : « Le bien du peuple doit être le grand objectif du gouvernement. Par les lois de la nature et de la raison, les gouverneurs sont investis du pouvoir à cette fin. Et le plus grand bien du peuple est la liberté. Elle est à l’État ce que la santé est à l’individu. »

Le « plus grand bien du peuple » selon Diderot a fini par être renversé par l’économie mainstream actuelle pour faire référence à la richesse qui reviennent principalement aux rentiers, richesse que les Physiocrates et autres réformateurs français avaient à l’époque décidés de taxer. Aujourd’hui, la réaction anti-classique redéfinit la liberté pour que les prédateurs soient libérés des sanctions imposées par le gouvernement contre leurs comportements socialement destructeurs. Renversant complètement la logique classique de libération des marchés de l’emprise des rentiers, les néolibéraux considèrent que la réglementation des monopoles et des taux d’intérêt, l’investissement public et la taxation de la propriété foncière et de la finance sont des atteintes à la liberté. Cela va à l’encontre de la liberté de chacun de ne plus être tributaire d’une dette pour accéder au logement, à l’éducation, aux soins médicaux et à d’autres besoins essentiels.

Etroitement associé à l’Encyclopédie, le Dictionnaire philosophique (1764), rédigé par Voltaire dans un style plus aphoristique avec son esprit et son ironie habituels, est une critique sarcastique et mordante de l’Église catholique romaine, de la noblesse et de la royauté. Voltaire formule, à sa manière, un argument semblable à celui d’Orwell en décrivant les caractéristiques du Faux Esprit :

« Nous avons des aveugles, des borgnes, des bigles, des louches, des vues longues, des vues courtes, ou distinctes, ou confuses, ou faibles, ou infatigables. Tout cela est une image assez fidèle de notre entendement. Mais on ne connaît guère de vues fausses. Il n’y a guère d’hommes qui prenne toujours un coq pour un cheval, ni un pot de chambre pour une maison. Pourquoi rencontre-t-on souvent des esprits assez justes d’ailleurs, qui sont absolument faux sur des choses importantes ? Pourquoi ce même Siamois qui ne se laissera jamais tromper quand il sera question de lui compter trois roupies, croit-il fermement aux métamorphoses de Sammonocodom ? (...) Les plus grands génies peuvent avoir l’esprit faux sur un principe qu’ils ont reçu sans examen. Newton avait l’esprit très faux quand il commentait l’Apocalypse. Tout ce que certains tyrans des âmes désirent, c’est que les hommes qu’ils enseignent, aient l’esprit faux.  » 

Se référant à un fakir (sans doute pour éviter la censure en parlant d’une vierge qui accouche et de résurrection), Voltaire note que « plus il a l’esprit subtil, plus il l’a faux ; et il forme ensuite des esprits faux comme lui ». De tels individus « raisonneront de manière tordue toute leur vie ». Mon propre dictionnaire critique les économistes néolibéraux du « marché libre » dont le raisonnement similairement erroné est basé sur de fausses hypothèses, à l’abri du bon sens empirique.

Voltaire explique que la manière la plus typique de motiver un esprit erroné était « de ne pas examiner si le principe est vrai, même quand on en déduit des conséquences précises ». C’est la méthode de l’économie mathématique actuelle, des statistiques du revenu national, et en particulier du commerce international et de la théorie monétaire. (Je présente un répertoire des citations des lauréats du prix Nobel d’économie selon ces lignes anti-scientifiques dans mon article sur « L’Economie comme fraude » dans ce livre.).

{{}}L’économie néolibérale du « marché libre » joue aujourd’hui le rôle que la religion a joué à l’époque de Voltaire. Mais dans le monde universitaire, l’avertissement que Voltaire fournit à ses lecteurs reste vrai : « Il est dangereux d’avoir raison dans les affaires où les hommes établis ont tort. » C’est peut-être pour cette raison que les diplômés en sciences économiques mettent aujourd’hui de côté leurs doutes lorsqu’ils se lancent dans une carrière au sein de respectables universités .

Une terminologie euphémisante est utilisée pour vulgariser des politiques autrement impopulaires, ou au moins pour gagner du temps en créant de la confusion chez les parties lésées. Si l’objectif est de briser les syndicats, d’abaisser les niveaux de salaire et de réduire la protection sur le lieu de travail, la tactique appropriée de relations publiques consiste à tenter de coopter les travailleurs en appelant le programme « capitalisme ouvrier », comme l’avait fait le général Pinochet au Chili après son coup d’État militaire de 1973, ou « capitalisme populaire » comme son admiratrice Margaret Thatcher l’a fait en Grande-Bretagne après sa victoire conservatrice de 1979. De même, pour confondre les choses en créant un faux vocabulaire complétant une fausse histoire, les lobbyistes en faveur de la privatisation ont qualifié la réglementation publique et la protection des consommateurs d’« ingérence », de Route de la servitude à l’instar de Friedrich Hayek en 1944 - comme si le néolibéralisme n’était pas le chemin vers la servitude et le péonage par la dette.

Le programme académique a été détourné pour remplacer l’économie politique classique par une idéologie apparemment dépolitisée mais en réalité pro-rentière. Le symbolisme mathématique se voit attribuer le rôle de sanctificateur jadis offert par le latin. En singeant les sciences naturelles, les économistes se réfugient dans des modes d’expression abscons. Plus les calculs sont complexes, plus les relations et les conclusions postulées ont tendance à être simplistes et banales. La plupart des calculs font référence à des choix entre différents « paniers » de biens et de services, sans une analyse approfondie de la manière dont ils sont produits, ni des conséquences à long terme sur l’économie de l’achat à crédit au lieu de l’argent liquide.

Les théories économiques qui se concentrent sur l’échange de biens et de services sans discuter des moyens d’acquérir un contrôle sur la richesse détournent l’attention de l’examen de ce qui est le plus important pour façonner l’économie. En fin de compte, la question est de savoir si ce que le jargon économique qualifie d’économie « réelle » de production et de consommation est plus réelle que les revendications financières et immobilières.

Il n’est pas possible de renflouer les banques et de permettre aux débiteurs de payer. Un des deux doit perdre. C’est la raison pour laquelle le problème économique est finalement celui de l’insolvabilité, et pas simplement celui du manque de liquidité temporaire. Le principal problème économique est de savoir si la dette de l’économie doit être réduite pour refléter la capacité de payer, ou si la croissance et le niveau de vie doivent être sacrifiés pour préserver la valeur des créances.

La distinction classique entre les revenus de production et les revenus de prédation.

Il y a une fausse histoire et une vraie histoire. L’histoire factuelle est rarement la version promue par les « vainqueurs » (ou les prétendants vainqueurs - le combat n’est pas encore terminé). La même chose est vraie de la théorie économique. Il n’existe qu’une seule réalité économique. En principe, il ne devrait donc exister qu’un corps de théorie : l’économie de la réalité. Mais les intérêts particuliers des vainqueurs favorisent la supercherie et l’exclusion pure et simple d’une partie de la réalité afin de se présenter comme des héros économiques, comme si leurs gains de prédation étaient ceux de la société en général. Leur image auto-satisfaite caractérise ce qui est acceptable pour l’économie mainstream. Agissant pour le compte d’intérêts financiers, immobiliers et monopolistiques pour défendre la déréglementation et la détaxation de leurs gains, les néolibéraux ont kidnappé les économistes classiques dans les mailles de leur panthéon. Ils vantent Adam Smith tout en détournant l’attention de ce que lui et ses disciples classiques ont dit. Leur réécriture de l’histoire de la pensée économique aboutit à dépeindre la critique smithienne des rentiers et du financement par la dette comme une hérésie.

Pendant deux siècles, les économistes classiques ont lutté contre les intérêts acquis des rentiers qui ont survécu aux codes du droit post-romain et au féodalisme des chefs de guerre qui a suivi. Mais la réforme progressive fut interrompue après la Première Guerre mondiale. À l’Âge d’Or des années 1880 et 1890, une réaction anti-classique commença à apparaître et se renforça après la fin de la Première Guerre mondiale qui mit fin à la socialisation du capitalisme industriel (par exemple, le système public de retraites et de santé, les investissements publics dans les infrastructures et dans l’éducation) et à la mobilisation du secteur bancaire pour financer l’industrie, florissante surtout en Allemagne.

La pratique bancaire anglo-américaine est devenue la norme, en alliance avec l’immobilier et les monopoles, au lieu de la triade autrefois attendue du capitalisme industriel, des banques et du gouvernement. La lutte entre ce qui semblait être les vagues de l’avenir - le « socialisme d’Etat » et le « socialisme marxien » - a été balayée par une économie d’extraction de rentes. Un nouvel ensemble de concepts et de définitions économiques est apparu, avec pour objectif de tuer la résistance contre ce qui s’avère être clairement un mouvement Anti-Lumières.

Les intérêts des rentiers vainqueurs reconnaissent que tant qu’ils peuvent capturer l’esprit des politiciens et du public pour façonner la façon dont les gens perçoivent la dynamique de l’économie, il n’est pas nécessaire de dépenser de l’argent pour les corrompre ou les combattre. Tant que les 1% pourront contrôler le programme éducatif pour enseigner que nous sommes à la fin de l’histoire et qu’il n’y a pas d’alternative (TINA) [6], ils enlèveront aux électeurs la possibilité de conceptualiser une alternative (voir Hypocognition ci-dessous). Ils défendent l’idée que l’austérité - et la polarisation économique qui l’accompagne - constituent le destin national de notre époque, et non un renversement de la dynamique de la société civile.

Il n’est pas nécessaire de réinventer la roue pour remplacer le malaise actuel par une analyse plus réaliste. Mon modèle économique vise à préparer le terrain pour la création d’un format de comptabilité plus réaliste pour le revenu national et les comptes de produits en excluant la charge des frais généraux de rentier de la catégorie de « produit ». La rente est un revenu sans produit, un prix « vide » sans valeur. Lorsque des revenus de prédation sont versés au secteur de la finance, des assurances et de l’immobilier (FIRE sector) et aux monopoles, ils se font au détriment des salaires, des bénéfices industriels et des impôts.

Ce livre est donc conçu comme un antidote, commençant par une rénovation du langage utilisé pour décrire comment notre économie fonctionne (ou ne fonctionne pas). Les entrées de A à Z de la section vocabulaire illustrent la distinction entre les points de vue historique, politique et méthodologique.

La démocratie hypocognitive : nouvel oxymore politique

Lorsque j’étais étudiant dans les années 1950, l’approche linguistique de Sapir-Whorf était la norme. Benjamin Lee Whorf décrivait comment le vocabulaire et la sémantique du langage façonnent la manière dont les locuteurs conceptualisent le monde qui les entoure. Les études menées par l’anthropologue Robert Levy sur les taux de suicide tahitiens dans les années 1960 montrent que ces taux augmentaient lorsque des événements malheureux rendaient les gens tristes. Mais leur langue n’avait aucun mot pour « triste » ou « déprimé ». Ils disaient « malade » ou « étrange » et se reprochaient ce qu’ils ressentaient. Comme beaucoup d’autres groupes pauvres en vocabulaire, ils ont attribué leurs sentiments de chagrin ou de frustration à une présence démoniaque qui semblait dominer leur vie. Pour décrire ce phénomène, le linguiste George Lakoff a inventé un terme, l’hypocognition, soit une condition dans laquelle « les mots ou le langage qui doivent exister pour formuler une idée de manière à conduire à une communication persuasive est soit inexistant, soit inefficace. [7] » Dans son livre de 2004, Ne pensez pas à un Eléphant ! Connaissez vos valeurs et encadrez le débat, George Lakoff accuse les doctrines libertaires du « marché libre » de responsabilité personnelle et le concept de « moins de gouvernement » comme souffrant d’une « hypocognition massive ». Faute de concepts économiques appropriés pour comprendre ce qui appauvrit les gens, l’idéologie de la responsabilité personnelle pousse les gens à se reprocher de ne pas pouvoir éviter d’être piégés dans un système d’empoisonnement par la dette.

Ce dictionnaire a pour objectif de fournir le vocabulaire et les concepts nécessaires à un diagnostic plus efficace de la dépression économique (et par extension psychologique), en pensant en termes d’intérêts composés, de péonage par la dette, d’économies de rentes, de revenus de prédation, de jeu à somme nulle et de parasitisme économique. En l’absence de tels concepts, les économies néolibérales actuelles ont tendance à succomber au virus du double langage orwellien.

La Propagande Economique [8] et son vocabulaire euphémisant visent à limiter les outils de la pensée en détournant l’attention des causes - et donc du remède nécessaire – par une économie du ruissellement tendant à dissimuler les phénomènes du parasitisme rentier sous une cape d’invisibilité sémantique. La vie de nombreux débiteurs semble être prise en charge par un nuage ou une présence démoniaque, une personnification économique de Dracula, qui vit de leur gagne-pain. Les politiciens accusent les immigrés ou d’autres minorités de prendre leur travail, tandis que les lobbyistes tentent de convaincre les salariés et la classe moyenne que ce qui les retient dans l’endettement n’est pas le coût élevé du logement, de l’éducation et de la vie financés par des hypothèques, des prêts étudiants et des crédits divers. La responsabilité incombe désormais au gouvernement pour avoir trop taxé les 1% et avoir « trop réglementé » les entreprises avec des exigences bureaucratiques, en particulier des réglementations visant à promouvoir la qualité de l’air, des aliments sains et une comptabilité honnête.

L’analphabétisme mathématique est une condition préalable à l’incompréhension généralisée de cette croissance exponentielle des prétentions du secteur financier sur l’économie, tandis que la Propagande Economique ne parvient pas à attribuer la polarisation économique actuelle à la dynamique prédatrice de la déflation par la dette. La dette absorbe presque toute la croissance économique de pays tels que la Grèce. Quand le volume de la dette augmente autant que le revenu national ou le PIB, et qu’il porte un taux d’intérêt (généralement 5%) supérieur au taux de croissance de l’économie (typiquement entre 1% et 2% seulement), alors toute la croissance est prise par les créanciers. Sans une compréhension générale de la financiarisation de notre économie et de l’engagement des revenus et de la richesse des créanciers, il ne saurait y avoir de véritable démocratie économique dans laquelle les électeurs éliraient des représentants qui les sauveraient de la dépression et de ce que Martin Luther appelait le démon Cacus (personnification de la croissance exponentielle de la dette). Toute prétention démocratique dépourvue de cette compréhension économique est un oxymore – c’est-à-dire sa contradiction politique interne.

Réécrire l’histoire économique en redéfinissant le sens des mots

L’histoire est écrite par les vainqueurs, et les vainqueurs d’aujourd’hui prennent la forme d’un retour en force des intérêts acquis. Tout comme la vérité est la première victime de la guerre, le passé est réécrit comme s’il devait mener inexorablement au présent. En réécrivant l’histoire de la pensée économique, les lobbyistes des rentiers ont créé un faux pedigree de ce qu’est un marché libre classique. L’objectif est de faire croire que tous les économistes qui se voient attribuer un statut dans le panthéon intellectuel souscrivent à l’opinion mainstream actuelle selon laquelle la richesse et le revenu sont répartis de manière équitable, et que les élites financières sont principalement responsables de sa création.

Dans cette nouvelle représentation, Winston Smith a remplacé Adam Smith. Dans 1984 d’Orwell , le super-Etat anglo-américain Oceania emploie Winston Smith pour réécrire le passé. Son travail au ministère de la Vérité consiste à mettre continuellement à jour l’histoire pour l’adapter à la ligne toujours changeante défendue par Big Brother. Le slogan du ministère est le suivant : « Qui contrôle le passé contrôle l’avenir. Qui contrôle le présent contrôle le passé. »

La linguistique est devenue une victime au même titre que l’histoire. On peut donc dire que celui qui contrôle la langue contrôle la façon dont les gens perçoivent le monde qui l’entoure. Comme Michael Lewis l’a décrit dans The Big Short : « Le marché des prêts hypothécaires à risque possédait un talent particulier pour masquer ce qui devait être clarifié ». Lewis développe :

« La langue n’a pas la même finalité sur le marché obligataire que dans le monde extérieur. La terminologie du marché obligataire était moins conçue pour véhiculer du sens que pour déconcerter les étrangers. (...) Le plancher des obligations hypothécaires à risque n’était pas appelé plancher - ou tout ce qui pourrait amener l’acheteur de l’obligation à se faire une image concrète - mais des tranches. La tranche inférieure - le rez-de-chaussée risqué - ne s’appelait pas le rez-de-chaussée mais la mezzanine (...) ce qui la faisait moins ressembler à un investissement dangereux et davantage à un siège très prisé dans un stade en forme de dôme. »

Dans A Wizard of Earthsea (1968), l’écrivain de science-fiction Ursula LeGuin décrit des sorciers formés par le « Maître des Noms, un maître qui connaît le vrai nom de tout. » Un critique moderne commente l’idée de LeGuin : « Le vrai nom est différent du nom commun, public. Lorsque vous apprenez le vrai nom de quelque chose, vous pouvez récupérer le pouvoir dont il dispose sur vous. Nous devons faire cela avec le système dans lequel nous vivons. » [9]

Ce vrai nom est empêché par les lobbyistes financiers et leurs stratèges en relations publiques, qui ont élaboré le vocabulaire utilisé par les médias populaires pour discuter de l’économie. Le but est de détourner l’attention de comment le monde fonctionne réellement en créant une vision de conte de fées dans laquelle il n’y a pas d’extraction de rentes ni de repas gratuit - alors que l’économie actuelle dépend essentiellement de la manière d’obtenir un repas gratuit.

Pour préserver leurs privilèges spéciaux, les intérêts privés doivent convaincre le monde entier qu’ils gagnent leur fortune en contribuant au bien commun. Ils décrivent les réformes de l’ère progressiste et les programmes de régulation économique et sociaux qui en découlent comme une rechute dans l’autocratie sur la voie du servage de dette, et non comme une évasion de l’héritage féodal des intérêts des rentiers. Leurs politiques égoïstes plongent les économies dans l’austérité parce qu’ils font pression pour persuader les gouvernements d’absorber leurs pertes financières.

Diriger la civilisation sur cette voie destructrice est un détournement absurde de la tradition de l’économie politique classique. Mais comme l’a fait remarquer Voltaire : « Les gens qui croient aux absurdités commettent des atrocités ». Les absurdités de l’économie mainstream ont conduit aux atrocités de l’austérité en Grèce, à la dépopulation en Lettonie et au démantèlement post-soviétique de l’industrie russe et balte depuis 1991. La richesse croissante des 1% est obtenue en imposant une austérité à des économies nationales entières et en les dépouillant des leurs actifs.

Les applaudissements nourris qui accueillent ce démantèlement des actifs et l’économie de bulles en tant que modèle économique - ainsi que la tolérance à la déflation par la dette - maintiennent le monde dans une dépression de plus en plus profonde tout en permettant à une surclasse rentière de devenir les seigneurs néo-féodaux de ce siècle.

La prétendue opposition des « marchés libres » au servage/communisme.

Au-delà du vocabulaire d’une langue, la pensée est façonnée par des métaphores sociales et une psychologie de groupe. Dans son livre intitulé Propaganda et publié en 1928, Edward Bernays (1891-1996), neveu de Sigmund Freud, décrit la nouvelle discipline des relations publiques (son euphémisme pour propagande) comme une forme de « gouvernement invisible » pour manipuler les électeurs et les consommateurs en jouant sur leurs espoirs et leurs peurs. « Si nous comprenons les mécanismes et les motifs de l’esprit de groupe, n’est-il pas possible de contrôler et de régir les masses selon notre volonté sans qu’ils le sachent ? [10] » La technique clé, « l’ingénierie du consentement [11] », comme Bernays l’expliquera plus tard, est destinée aux stratèges en relations publiques et à leurs faiseurs d’opinion bien pensantes qui devaient mobiliser « l’instinct grégaire » et créer une mentalité manichéenne du « nous contre eux » afin de canaliser l’intérêt des électeurs et les consommateurs à agir contre leurs intérêts réels.

Après avoir fait campagne pour Woodrow Wilson en promouvant l’entrée des États-Unis dans la Première Guerre mondiale comme un combat contre les « Huns Germaniques »,
Bernays a contribué à rendre le tabagisme acceptable et même chic pour les femmes dans les années 1920, appelant les cigarettes « des flambeaux de la liberté ». Plus tard, il a soutenu le renversement du président démocratiquement élu du Guatemala, Jacobo Arbenz, par la United Fruit Company en 1954, en l’appelant « communiste » [12]. Les parrains américains de la nouvelle junte ont décrit le renversement de la réforme agraire du pays et de la libération de l’esclavage de la dette rurale comme une restauration des marchés libres.

C’est ainsi que les néolibéraux d’aujourd’hui encadrent leurs politiques pour obtenir l’acquiescement du public. Se libérer du communisme (« eux ») signifie marchés libres (« nous »), définis comme s’opposant à une imposition progressive et à d’autres politiques sociales-démocrates dans l’intérêt réel des électeurs et des consommateurs. Tout comme les fabricants de cigarettes qui recherchaient des médecins pour assurer aux consommateurs que fumer était bon pour la santé (et rendait minces !), les 1% font défiler les lauréats du prix Nobel d’économie pour promouvoir les politiques économiques de ruissellement et les allégements fiscaux accordés aux riches.

Une extension logique de l’approche de Bernays est celle de Leo Strauss, émigré allemand devenu professeur à l’Université de Chicago (1949-1969). Strauss explique que le moyen de mobiliser les gens derrière une politique consiste à faire appel à l’identité de leur groupe à la manière du « nous » versus « eux » de Bernays. Un ensemble de mythes est nécessaire pour façonner l’opinion publique, à l’instar de la République de Platon qui décrit un « noble mensonge » (gennaion pseudos) : « un stratagème pour l’un de ces mensonges qui naissent en cas de besoin - un noble stratagème » [13] pour faire accepter la règle des élites en tant qu’ « âmes d’or. » C’est ce que les oligarques grecs ont fait quand ils s’appelaient eux-mêmes aristocraties (« les meilleurs »), affirmant que leurs actions protégeaient la cité contre « des âmes cuivrées » (des réformateurs populistes diabolisés en tant que « tyrans ») qui pourraient occuper leur place de dirigeant, annuler les dettes et redistribuer la terre.

Un autre collègue de Strauss à Chicago (1950-1962), Friedrich Hayek, a assimilé les programmes sociaux de l’ère progressiste, le communisme, le nazisme et le fascisme, en tant qu’ingérence sur les « marchés libres » et donc comme « route vers la servitude ». Sa rhétorique visait à inverser la tendance des économistes classiques à mettre fin aux privilèges des rentiers et ainsi à libérer les économies de l’héritage actuel du servage, à savoir une classe de propriétaires héréditaires et des banquiers se ralliant à d’autres intérêts d’extraction de rentes.

Pourquoi les néolibéraux soutiennent les impérialistes néoconservateurs

Les idéologues anti-gouvernementaux nomment « route de la servitude » les investissements publics réalisés afin d’empêcher l’extraction de la rente par le secteur privé. La géopolitique joue un rôle, les investisseurs américains cherchant à contrôler les ressources naturelles et les monopoles publics générant des rentes à l’étranger. Cette volonté de contrôle réunit des économistes néo-libéraux et des néo-conservateurs militaires qui militent pour un « changement de régime » des pays désireux de protéger leurs marchés, leurs domaines publics et leurs systèmes bancaires afin de promouvoir leur croissance et leur bien-être. Les partisans néoconservateurs de Strauss tordent « l’intelligence » en nœuds de sophismes qui ont façonné l’idéologie américaine de la Guerre Froide [14]. Son collègue professeur à Chicago (1964-1980), Albert Wohlstetter, fut conseiller des faucons, Paul Wolfowitz et Zalmay Khalizad, un immigré afghan qui mobilisa le soutien américain pour soutenir les Talibans contre le régime laïc allié à la Russie, ce qui enflamma des groupes militaires fondamentalistes voulant renverser les gouvernements du Proche-Orient qui cherchaient à obtenir leur autonomie par rapport au contrôle américain.

Wolfowitz et Khalizad organisèrent une campagne de diffamation contre Saddam Hussein, un peu comme celle de Bernays contre le Guatemala, affirmant que l’Irak parrainait Al-Qaïda et possédait des armes de destruction massive [15]. Les néolibéraux ont créé un « noble mensonge » en amalgamant Adam Smith, John Stuart Mill et d’autres économistes classiques au soutien de la non-imposition et de la déréglementation des secteurs de la finance, de l’immobilier et de l’extraction de rente. C’est pourtant le contraire de ce que les économistes classiques ont préconisé dans leur la théorie de la rente qui visait à mesurer et taxer les revenus de prédation.

Un tel sophisme ou « noble mensonge » décrit la politique économique et fiscale pro-financière comme un rempart démocratique contre des gouvernements suffisamment puissants pour contrôler le pouvoir de la haute finance et ses intérêts alliés d’extraction de rentes. Les 1% visent à créer une mythologie de la tradition, une dépendance au syndrome de Stockholm et une inévitabilité historique pseudo-darwinienne pour amener les gens à soutenir les 1% en tant que « nous » universel, tout en diabolisant les défenseurs des intérêts des 99%.

Cette Propagande Economique promeut les traités néolibéraux en tant que « réformes » des lois, des règles fiscales et commerciales, renversant les réformes réelles de l’ère progressiste. Les « experts » (lobbyistes d’entreprises) se parent de nominations universitaires prestigieuses pour redéfinir le « progrès » comme s’il n’y avait pas d’alternative rationnelle au déplacement de la planification économique des mains d’un gouvernement démocratique vers les centres financiers mondiaux. La Nouvelle Guerre Froide idéologique est administrée par le FMI, la Banque Mondiale et l’Organisation Mondiale du Commerce sous le contrôle des États-Unis. Les pays qui adoptent des politiques qui ne servent pas Wall Street et ses satellites financiers sont réputés suivre la voie de la non-liberté - celle de « l’autre ». Ce renversement de ce que l’on pensait être un progrès il y a un siècle est un travestissement de la liberté et un mensonge ignoble - comme le sont la plupart des « nobles mensonges » – quand on y pense sérieusement.

// Article publié le 12 janvier 2018 Pour citer cet article : Michael Hudson , « J. Is for Junk Economics. Petit bréviaire économique (1) », Revue du MAUSS permanente, 12 janvier 2018 [en ligne].
https://journaldumauss.net/./?J-Is-for-Junk-Economics-Petit-breviaire-economique-1
Notes

[1Tout au long de cette introduction, nous avons choisi de traduire « unearned income  » par « revenu de prédation » et « earned income  » par « revenu de production ». Cette traduction nous semble être dans le respect de la logique de l’œuvre de Michael Hudson.

[2Tout au long de cette introduction, nous avons traduit « free lunch  » par « repas gratuit ».

[3James Galbraith et J.Luis Martin, « Le Calice Empoisonnée » : http://lesakerfrancophone.fr/le-calice-empoisonne-jusqua-la-lie-de-la-zone-euro-a-la-zone-morte. Nous conseillons aussi le très bon livre inspiré par Thorstein Veblen de James Galbraith intitulé The Predatory State qui démontre comment l’Etat et le Marché fusionnent dans une oligarchie prédatrice.

[4En anglais : Finance, Insurance and Real Estate sector

[5En anglais : National Income and Products Accounts

[6En anglais : There Is No Alternative

[7George Lakoff, “Women, Fire and Dangerous Things”, Mach 27, 2013, cited in Rebecca J.Rosen, “Millions of Americans are facing a serious financial problem that has no name,” The Atlantic, May 7, 2016. See also Robert I. Levy, Tahitians : Mind and Experience in the Society Islands (Chicago : 1975).

[8Tout au long de cette introduction, nous avons traduit « Junk Economics  » par « Propagande Economique ». Cette traduction s’inscrit, nous semble-t-il, dans le respect de la logique défendue par Michael Hudson.

[9Anne Wilson Schaef, When Society Becomes an Addict (Harper, San Francisco, 1987) p. 10.

[10Edward Bernays, Propaganda (1928), p.47.

[11“The Engineering of Consent”, Annals of the American Academy of Political and Social Science 250 (March 1947), pp. 113-20. On recommande aussi le livre désormais classique de Noam Chomsky : “La Fabrication du Consentement : De la Propagande Médiatique en Démocratie”.

[12Les détails sont racontés dans le livre de Stephen Schlesinger et de Stephen Kinzer, Binter Fruit : The Untold Story of the American Coup in Guatemala (1999), pages 78 à 90.

[13Plato, Republic, Book 3, 414b-415d

[14Seymour Hersh, “Selective Intelligence,” The New Yorker, May 12, 2003.

[15Jim Lobe, « Leo Strauss’ Philosophy of Deception”, Alternet, May 18, 2003. https://www.alternet.org/story/15935/leo_strauss’_philosophy_of_deception ’Comme Thomas Hobbes, Strauss pensait que la nature intrinsèquement agressive des êtres humains ne pouvait être maîtrisée que par un puissant État nationaliste.’ Parce que l’homme est intrinsèquement méchant, il doit être gouverné ’, a-t-il écrit. Cependant de tels gouvernements de peuvent être établis que lorsque les hommes sont unis - et ils ne peuvent être unis que contre d’autres personnes.’ Voir aussi Scott Hortin « Will the Real Leo Strauss Please Stand Up ? » The Harpers blog, July 31, 2016. https://harpers.org/blog/2008/01/will-the-real-leo-strauss-please-stand-up/

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